Ellipses – Audrey Pleynet

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Je ne lis habituellement pas de récits d’auteurs auto-édités mais j’ai fait une exception pour Ellipses, un recueil de nouvelles signé Audrey Pleynet, suite aux très bons avis que j’ai pu lire chez d’éminents confrères blogueurs. Et comme j’ai pu croiser l’autrice à Sèvres, j’ai même pu faire dédicacer mon exemplaire !

Résumé

(source éditeur)

Une reine qui découvre le secret de sa planète et l’origine de son pouvoir, d’inestimables leçons de survie dans un monde post-apocalyptique, une puce qui permet de vendre sa douleur, un programme du gouvernement tirant partie de notre addiction aux réseaux sociaux…Parcourez les ellipses de huit nouvelles de science-fiction qui explorent l’avenir de l’humanité, autant dans sa capacité de création que dans les sombres dérives qui la guettent…
Au sommaire: Les reines de Cyanira – Tu t’en souviendras ? – Les questions que l’on pose – Dolores – Icône – Alchimistes du rêve – Tu étais pourtant si fier de moi – Citoyen+

Editeur : auto-édition – Date de parution : 01/03/2019 – 157 pages

L’Auteur

(source éditeur)

Professionnelle de l’humanitaire et du social, Audrey Pleynet a publié son premier roman de science-fiction Noosphère en 2017. Lauréate de nombreux concours de nouvelles, elle signe avec Ellipses son premier recueil personnel.

Mon avis

Les reines de Cyanira : un récit qui fleure bon l’Âge d’Or de la SF puisqu’il est ici question d’une planète dont la reine possède des pouvoirs psy, capables par exemple d’éradiquer des flottes spatiales ennemies. Hélas, la princesse Shyrel, qui accède au trône se révèle bien moins douée que ses prédécessrices, et n’a quasiment aucun pouvoir. Et comme le peuple ennemi s’en doute, la guerre menace d’éclater et d’être dévastatrice. A moins que la reine n’ait un atout secret… Une nouvelle qui aurait pu faire un court roman dans les années 50 ou 60, et qui se révèle agréable même si assez « classique ». Hélas, elle comporte aussi des défauts de style agaçants : de nombreuses phrases trop longues et mal ponctuées de virgules (un défaut que j’ai aussi).

Tu t’en souviendras ? est une nouvelle qui se déroule dans un contexte post-apocalyptique où la survie prime sur tout, à commencer par l’amitié et l’amour.L’oublier, c’est s’exposer et le texte, âpre, va droit au but même si je n’ai pas été entièrement convaincu par la durée de la « mission » de Vicky, peu compatible à mon avis avec l’univers qui prône l’urgence et le quotidien.

Les questions que l’on pose : une des meilleurs nouvelles du recueil, avec une histoire qui met en scène une Intelligence Artificielle qui passe petit à petit d’un outil chargé de donner des statistiques commerciales à une aide à la mise en place d’une dictature rampante. L’I.A. a-t-elle une âme, développe-t-elle des sentiments ou ne fait-elle que son travail ? Réponse en à peine dix pages poignantes.

Dolores : une puce électronique permet de soulager ceux qui souffrent en dispatchant leur douleur vers des volontaires ! Christine l’a développé et s’en ait fait greffer une après la mort de sa fille. Sur cette idée étonnante, Audrey Pleynet écrit une nouvelle qui mêle éthique (qui n’aimerait pas être soulagé de sa douleur ou prendre une partie de celle des gens qu’il aime ?) et commerce (des volontaires se font peu à peu rémunérer pour recevoir la douleur d’autres mieux logés qu’eux). L’autrice pousse les implications de cet univers jusqu’à la délocalisation des salariés, la copie de la technologie et même la récupération par l’armée ! Peu de pages mais un foisonnement d’idées très poussées.

Icône : Arsène est un photographe terriblement laid. Sa petite amie, Rosaline, fait changer son apparence en fonction de la mode et des célébrités du moment, au point d’avoir un visage standardisé. Pour contrer cette uniformité qui l’entoure, Arsène décide de s’exposer, quitte à choquer et à être rejeté. Fustigeant la mode, l’apparence et la superficialité, le texte se termine avec une chute douce-amère bien amenée.

Alchimistes du Rêve est la nouvelle qui m’a le moins parlé dans le recueil. Des duos de Veilleurs et de Rêveurs sont chargés de travaux de construction afin de gagner du territoire sur la mer et de construire ainsi des habitations. Si le Rêveur manipule la matière, le Veilleur l’aide et le guide. A condition qu’ils ne tombent pas amoureux, leur Lien étant « corrompu » par l’amour qui envahit le rêve.

Tu étais pourtant si fier de moi aborde, via les paroles d’un enfant destinées à son père, la thématique de la différence, de la jalousie mais aussi et surtout de l’expérimentation scientifique ! Là encore, on a une montée en puissance jusqu’à un final qui fait passer le texte de l’amour à l’horreur.

Citoyen+ : encensée sur le web, cette nouvelle a bien fonctionné et tenue ses promesses, même si elle n’est pas loin de certains aspects d’un épisode de Black Mirror (« Chute Libre » dans la saison 3). A l’heure de la dictature du Like, « J’aime » et autres statistiques, des cartes de fidélité qui poussent à la consommation et aux « bonnes affaires », des sites blindés de cookies qui ne se mangent pas, et tandis que les sociétés commerciales engrangent des trilliards de données sur leurs abonnés/guests/ambassadeurs/amis, quelle est encore la part de libre-arbitre quand on pratique une activité ou fait un achat ? Alain et Clara, bardés de bracelets et de tatouages connectés,se dupant l’un l’autre, vont le découvrir à leurs frais. Un texte réussi qui dénonce et se termine sur une note douce-amère.

Une sacré réussite que ce recueil (le premier de l’autrice qui plus est !), et d’emblée la barre est mise très haut. Abordant plusieurs thématiques d’anticipation ou de SF, Audrey Pleynet réussit ses textes dont elle varie le style narratif et brosse en quelques pages des univers bien pensés, amenant des questions intéressantes et les traitant sans concession, avec souvent un final surprenant. J’ai hâte de la retrouver dans d’autres textes !

D’autres avis : Le Culte d’ApophisL’Épaule d’OrionLes Lectures du MakiSur mes brizéesLorhkanAu Pays des Cave Trolls – …

25 commentaires

  1. Super critique.
    Je me le suis programmé, même si les recueils restent d’un intérêt plus limité que les romans dans mon coeur. Mais ayant lu d’excellentes choses, et celui-ci jouissant de retours superbes, je me dis qu’il devrait me séduire!

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  2. C’est vraiment un bon recueil, il y a beaucoup d’idées intéressantes pas forcement novatrices mais toujours bien amenées.

    Pour info elle est présente au sommaire de deux recueils : Naufragés de l’Espace chez Critic et Les migrations du futur chez Arkuris.

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