Elle qui chevauche les tempêtes – George R.R. Martin et Lisa Tuttle

elle qui chevauche les tempêtes

Il y a longtemps que je voulais lire Elle qui chevauche les tempêtes, car j’aime beaucoup ce qu’écrit G.R.R.M. qu’on réduit un peu trop à sa saga fétiche Le Trône de Fer, et le titre m’attirait tout en m’intriguant. La re-sortie récente chez FolioSF était l’occasion.

Résumé

(source éditeur)

Sur une planète océane, où les naufragés venus de la Terre se sont divisés en deux castes, les rampants et les aériens, Mariss est une fille de pêcheur, une rampante, recueillie à la mort de ses parents par Russ, un aérien. Élevée comme telle, elle découvre le bonheur de fendre les cieux, messagère portée par les vents, grâce aux ailes léguées par les mythiques navigateurs stellaires de jadis. Hélas, le fils de Russ, Coll, est sur le point d’atteindre sa majorité. Les ailes deviendront siennes, comme le veut la coutume.
Commence alors pour la jeune femme un combat acharné pour garder un sens à sa vie, une lutte infinie qui aura des répercussions sur toute la planète. Mariss saura être plus forte que la tradition, plus forte que tous les autres, car c’est elle qui chevauche les tempêtes et nul autre.

Récit d’une lutte passionnelle, magnifique aventure aérienne, Elle qui chevauche les tempêtes est l’unique collaboration de l’auteur du Trône de fer, George R. R. Martin, et Lisa Tuttle.

Editeur : FolioSF – Traduction : Patrick Marcel – Date de parution : 06/02/2020 – 544 pages

L’Autrice

(source éditeur)

Lisa Tuttle naît aux Etats-Unis en 1952, mais vit au Royaume-Uni depuis le début des années 1980. Sa première nouvelle a été publiée en 1972 et plus d’une centaine d’autres ont suivi. Elle est également l’auteur d’une douzaine de romans dont Elle qui chevauche les tempêtes, écrit en collaboration avec George R R Martin. Elle a reçu le Grand Prix de l’Imaginaire en 2012 pour son recueil Ainsi naissent les fantômes.

L’Auteur

(source éditeur)

George R.R. Martin, scénariste et producteur de nombreux films et feuilletons de télévision, est également l’auteur de la célèbre série Trône de Fer – adaptée sous le titre Game of Thrones par HBO.

Mon avis

Elle qui chevauche les tempêtes (très joli titre qui détourne l’original : Windhaven en anglais), se situe sur une planète recouverte d’eau, sur laquelle s’est écrasée il y a des siècles une nef stellaire. A partir de ses voiles, faites en une matière quasiment indestructible, les colons survivants ont taillé des ailes qui leur permettaient de se déplacer rapidement, grâce aux vents nombreux et puissants, entre les îlots qui parsèment la surface. A l’époque du récit, il ne reste que des légendes sur cet âge passé, sur les guerres fratricides qui ont suivi et mené à deux castes distinctes : les rampants, vivant au sol sur leurs îles en un système quasi-féodal, et les aériens, messagers ailés et caste supérieure dont l’aîné hérite à sa majorité des ailes de son parent selon une loi immuable. Le récit se situe donc dans un atmosphère de « very low SF », celle-ci n’étant là que pour expliquer l’origine des fameuses ailes sources de toutes les convoitises. Car un volant qui disparaît en mer emporte avec lui une paire d’ailes dont le stock diminue alors, ce qui pénalise toute la société. Les aériens sont en effet des messagers, et à ce titre égaux aux seigneurs des terres, tandis que les voyages en bateau sont dangereux et assez peu fréquents, et qu’il n’existe pas d’autre moyen de communication.

La jeune Mariss, fille de rampant, est adoptée par un aérien et, dotée d’une grande maîtrise voire d’un don inné, se révèle une excellente pratiquante. Jusqu’au jour où son père adoptif décide, en application de la loi, de lui retirer les ailes qu’il lui prêtait et de les donner à son fils biologique. Celui-ci est bien peu doué et a peur de voler, de plus il préférerait être barde, métier pour lequel il est vraiment doué. Mariss va donc déclencher un conseil réunissant les volants et les inciter à se poser des questions sur le mérite individuel et sur les dons ou la maîtrise, plutôt que sur la généalogie. Bien sûr, cette évolution n’est pas au goût de tout le monde et comme tout système, toute loi, elle a des effets pervers que la suite du récit explorera. Notamment avec le personnage très antipathique (et un brin caricatural) de Val Une-Aile. On est alors dans une époque où les aériens peuvent être défiés et perdre (ou regagner) leurs ailes lors de concours annuels, et où des écoles permettent aux jeunes, notamment rampants (sacrilège !), d’apprendre à voler pour tenter leur chance au concours. Val profite du système et s’attire les inimitiés de tous lors du gain de ses ailes, mais la loi l’autorise à les garder. Faut-il respecter celle-ci à la lettre ou la tordre quand on estime que quelqu’un exploite le système ? Faut-il aider ceux qui poussent pour aller encore plus loin ou revenir à l’ancienne loi ? Les questions sont difficiles et les réponses parfois ambiguës.

Dans la troisième partie, Mariss est victime d’un accident de vol et se retrouve clouée au sol. Lorsqu’une aérienne enfreint la non-ingérence de sa caste, ou qu’un seigneur s’en prend à ces êtres réputés intouchables, la femme désormais mûre va devoir s’impliquer avec réticence. Mais difficile pour elle de se résoudre à une existence de rampant, quand bien même celle-ci lui apporte l’amour au passage, alors qu’elle a chevauché les tempêtes. Sera-t-elle capable de couper les ponts, de renier son passé ou un lien inaltérable s’est-il forgé malgré le rejet dont elle fait désormais preuve, puisqu’elle ne vole plus ? A moins que son expérience n’en fasse un pont entre les deux communautés ?

Il y a du Ursula Le Guin, voire du Jo Walton, dans Elle qui chevauche les tempêtes. Une belle ambiance, un monde dangereux, des peuples déchirés entre des lois anciennes et un besoin d’évolution, de belles interrogations et des personnages bien campés. Et la longue saga de Mariss, que l’on suit de son enfance à sa toute fin, en fait un récit poignant et passionnant.

A l’origine, les deux premières parties étaient des nouvelles parues dans la revue Analog en 1975 puis 1980. Tuttle et Martin y ont ensuite ajouté un troisième volet pour la parution en un seul tome, ainsi qu’une introduction et qu’une fin qui clôt admirablement la légende de Mariss. Dommage que les styles divergents des auteurs ne leur aient ensuite plus permis d’écrire ensuite, car cette collaboration est vraiment très réussie et j’ai passé un excellent moment sur cette planète balayée par les vents. En France, le livre est arrivé chez Denoël Lunes d’Encre en 1999 puis est passé en poche chez J’Ai Lu (sous le titre original Windhaven) avant de ressortir cette année chez FolioSF.

D’autres avis : Bookenstock (Dup) – Le Dragon GalactiqueLe Bibliocosme (Boudicca) – 233°C – …

23 commentaires

  1. Un très chouette roman, j’avais beaucoup aimé.
    Côté ragots : dans le Bifrost spécial Martin sorti il y a quelques années, on y apprend que les 2 auraient été amants 😀

    Aimé par 1 personne

  2. Je l’ai souvent croisé à la bibliothèque sans m’y intéresser plus que ça, tu me fais réaliser que j’ai sûrement eu tort. Tout ce que tu en dis est tentant, et le parallèle à Le Guin/Walton m’a achevé. ^^

    Aimé par 1 personne

  3. C’est vrai qu’il a l’air super. Je l’avais repéré il y a des années (certainement chez Tigger Lilly). Je le mets dans ma liste d’envies pour ne pas l’oublier….

    J’aime

  4. Lu il y a très longtemps, je le relirais bien pour mieux en apprécier certains aspects.
    J’adore le titre français, c’est un des rares cas de traduction qui s’éloigne de l’original pour mieux vendre le livre ❤

    J’aime

Laissez un commentaire...