Le Styx coule à l’envers – Dan Simmons

Dans la foulée du numéro de la revue Bifrost qui lui a été récemment consacré, Dan Simmons est revenu un peu sous les feux de l’actualité et je me suis penché sur le recueil de nouvelles intitulé Le Styx coule à l’envers.

Résumé

(source éditeur)

Et si vous pouviez ramener à la vie les êtres chers ?
Mais à quel prix…
Et si l’Enfer de Dante s’ouvrait sur Terre ?
Et si le seul rempart contre une horde de zombies se nichait dans la vocation inébranlable d’une institutrice ?
En douze récits tantôt tragiques, mélancoliques ou humoristiques, Dan Simmons tend à l’humanité un miroir terrifiant et explore ses thèmes de prédilection : la maladie, le prosélytisme religieux, la mort, l’enfance abîmée, la perversité des adultes.
Douze nouvelles navigant entre fantastique, horreur et science-fiction pour remonter le Styx… Car l’Enfer est peut-être bien ici-bas.

Editeur : Pocket – Traduction : Jean-Daniel Brèque – Date de parution : 29/04/2021 – 464 pages

L’Auteur

(source éditeur)

Né en 1948 dans l’Illinois, diplômé de littérature, Dan Simmons a été enseignant pendant quinze ans. Auteur d’une trentaine de romans et recueils de nouvelles, traduit dans 27 pays, lauréat de plus de 30 prix dont les prestigieux prix Hugo, Locus, Word Fantasy, Bram Stoker ou encore British Science Fiction, il est un maître incontesté de la science-fiction depuis Les Cantos d’Hypérion et le dyptique Ilium (2004) / Olympos (2006). Mais l’auteur explore aussi d’autres veines comme l’horreur ( Nuit d’été, 1993 ; Les Chiens de l’hiver, 2003) ou le policier ( L’Épée de Darwin, 2002). Parmi ses ouvrages les plus notables, on peut citer Terreur (2008), Drood (2011), Flashback (2012), Collines noires (2013) et L’Abominable (2019), publiés aux éditions Robert Laffont et repris en poche chez Pocket. Son dernier roman, Le Cinquème Coeur, a paru en 2020 chez le même éditeur.

Mon avis

Le Styx coule à l’envers est un recueil composé en France de douze nouvelles, et n’a pas son équivalent en anglais. Il s’ouvre par une préface (un peu prétentieuse) de Harlan Ellison qui revendique le fait d’avoir découvert Simmons (de façon amusante, on aura plus loin la version de l’auteur, passablement différente même si le rôle d’Ellison n’est pas à renier, bien sûr). Plutôt de de faire un recensement détaillé des 12 titres, plus ou moins réussis à mon goût, je ne développerai ici que mes préférés. A noter que les nouvelles sont précédées par une préface de l’auteur, qui dévoile parfois trop l’intrigue à venir, mais peut aussi parfois éclairer celle-ci (comme pour Deux minutes quarante-cinq secondes qui est assez obscure sans l’explication liée au contexte).

Le Styx coule à l’envers est la nouvelle qui a convaincu Ellison du talent de Simmons, et a poussé celui-ci à continuer d’écrire alors que sa carrière en décollait pas. On connait la suite (et notamment Hypérion qui l’a consacré). Si elle est émouvante et que la chute est glaçante, j’ai trouvé qu’elle aurait nécessité un peu plus de développement.

Vanni Fucci est bien vivant et il vit en Enfer – une farce assez moyenne qui se moque des télé-évangélistes américains assoiffés d’audimat et de dollars, pris au piège par un diable bien facétieux, en direct à la télévision bien sûr.

Passeport pour Viêtnamland est un texte intéressant qui revient à la fois sur les souvenirs et traumatismes liés à la guerre (celle du Viêtnam, donc, ici), et que certains anciens soldats n’oublieront jamais, mais aussi sur l’exploitation commerciale des circuits commémoratifs et touristiques liés aux conflits passés.

Deux minutes quarante-cinq secondes, comme je l’ai écrit plus haut, nécessite d’avoir lu la préface de Simmons pour mieux comprendre son contexte : celui de l’explosion de la navette Challenger et du traumatisme qu’elle a créé, non pas uniquement chez les familles ou les spectateurs, mais aussi dans l’équipe qui a fait partir la fusée, avec l’appât du gain en arrière-plan. Ici, une revanche est prise…

Métastases – une histoire de vampires intangibles mangeurs de cancers, si, si…

Douce nuit, sainte nuit – quand Dan Simmons revisite les contes de Noël, avec un télé-évangéliste (encore !), ce n’est hélas pas passionnant.

Mémoires privé de la pandémie des stigmates de Hoffer. Une charge violente contre les pêchés humains, à commencer par présentateurs de la télévision ou les hommes politiques, avant de s’étendre à tout le monde. C’est bien trop caricatural pour me convaincre.

Les Fosses d’Iverson. Circuit touristique ici aussi, enfin, reconstitution de bataille (Gettysburg) liée à la Guerre de Sécession. C’est un peu trop long mais cela fustige l’incompétence d’un gradé et une vengeance tout à fait fantastique et même horrifique.

Le Conseiller. Simmons a été enseignant et met ici en scène un conseiller, poste jugé le plus souvent inutile dans la système scolaire américain, qui se transforme en justicier (sanglant) pour punir ceux qui s’en prennent à ses élèves, et il dénonce ici notamment la dislocation de nombreuses familles. Si le texte est assez caricatural, il est (hélas) assez réaliste et la fin est bien vue.

Photo de classe – Prix World Fantasy de la meilleure nouvelle 1993 et prix Bram Stoker de la meilleure nouvelle courte 1992. Un texte qui reste assez nébuleux dans son contexte et n’est pas sans rappeler parfois Celle qui a tous les dons, mais on a ici une ode à certains enseignants, bien rares hélas, qui apprécient et s’occupent de leurs élèves. Et la fin est là aussi réussie.

Mes Copsa Mica. Ici Simmons mêle défense de l’environnement (pollution, nucléaire), politique (chute du communisme), santé (cancérologie) mais aussi Dracula ! C’est sans doute un peu trop disparate pour fonctionner vraiment, même si le sous-texte est intéressant.

À la recherche de Kelly Dahl. Enseignement toujours, enfant à problème encore mais cette fois un beau conte fantastique empreint de poésie, inhabituel et touchant, empreint de regrets et d’amour. Une belle réussite.

En conclusion : avec un recueil de nouvelles, on a fatalement des textes réussis et d’autres moins, et chaque lecteur y trouvera des qualités et des défauts. Personnellement j’ai bien aimé ce tome, et même si certains textes ne m’ont pas plu (sans qu’aucun soit complètement mauvais), la balance penche en faveur de Simmons grâce à quelques récits de bonne qualité, voire plus. Un bon moyen de découvrir l’auteur avec la forme courte.

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